Le droit de la culture, un maquis juridique
L'action culturelle issue de la décentralisation est un secteur qui souffre de la multiplicité des intervenants et des dispositions qui la régissent. Pour preuve, le maquis législatif et réglementaire touchant au droit de la culture peut sembler inextricable. L'impossibilité de regrouper tous les textes au sein d'un code unique de la culture reflète la complexité des dispositifs auxquels sont confrontées les collectivités territoriales.
Des dispositions éparses
Dans
leurs pratiques culturelles, les collectivités doivent maîtriser des
dispositions juridiques et réglementaires extrêmement
éparses : pas moins de neuf codes traitent en effet de la matière.
Les compétences obligatoires dévolues aux collectivités sont largement
encadrées : lois, arrêtés, notes d’orientation et autres
directives définissent leurs droits et devoirs. Certains domaines ne
relèvent cependant pas de cet encadrement (animation socioculturelle,
établissements de quartier, etc.) et les collectivités doivent
décider de leurs modalités de fonctionnement, de leurs structures et de
leurs objectifs culturels. A la marge, compétences obligatoires et
initiatives locales peuvent donc entrer en conflit.
Dans sa pratique culturelle, la collectivité devra gérer, tour à tour,
son statut d’entrepreneur de spectacles, d’employeur, de gestionnaire
de salle de cinéma ou de conservatoire de musique. L’action culturelle
communale, qui représente la majorité des investissements, est le
domaine le plus touché par cette profusion.
La création de nouveaux dispositifs complexifie le droit de la culture,
car souvent ces mesures s’ajoutent aux précédentes sans faire du passé
table rase. Les lois du 4 janvier 2002 en sont l’exemple : les
EPCC (établissements publics de coopération culturelle) sont un nouvel
outil de gestion culturelle, mais les autres demeurent ; la loi
sur les musées crée non pas un mais deux nouveaux types
d’établissements : les musées de France… et les musées contrôlés
qui n’opteront pas pour la nouvelle appellation.
Depuis 1982, ce sont une trentaine de lois et plusieurs centaines de
décrets sur la décentralisation culturelle qui ont vu le jour.
Par-dessus cette couche nationale, le droit européen apporte son lot de
directives.
Un manque de lisibilité
La
complexité croissante des interventions des collectivités s’accompagne
d’un manque d’outils juridiques et de compétences adaptés. Dans le
domaine culturel, la décentralisation n’a pas offert, jusqu’à
récemment, d’outils spécifiques permettant une gestion commune de
ressources et de compétences. Les structures peu adaptées à ces
missions restent majoritaires, comme les associations satellites des
municipalités (comités des fêtes, etc.) ou les syndicats intercommunaux
aux statuts mal définis. Ces structures entraînent souvent une gestion
de fait d’un élu responsable et ses inévitables conséquences civiles et
pénales.
Cette prolifération de structures dont les activités et les domaines de
compétences s’interpénètrent entraîne un manque de lisibilité des
missions et une difficulté à évaluer la pertinence des interventions.
Un tel maquis juridique n’est bien sûr pas pour faciliter la tâche des
acteurs culturels dans les collectivités. De nouvelles dispositions ont
donc été prises pour tenter d’y voir plus clair. Depuis 2001, les
protocoles de décentralisation culturelle proposent un nouveau partage
des responsabilités entre l’Etat et les collectivités locales dans les
domaines du patrimoine et des enseignements artistiques. Par ailleurs,
les EPCC, élargissant les modalités d’intervention et les compétences
des collectivités, pourraient remplacer les nombreuses structures
actuelles.
Repères :
Le
traité de Maastricht étend les compétences de l’Union à la culture et
prévoit qu’elle contribue à l’épanouissement culturel des Etats
membres. Son action vise à compléter l’action des Etats et encourage la
coopération culturelle. A ce titre, les accords avec des Etats tiers ou
des organisations internationales sont partie intégrante du droit
communautaire et lient les Etats membres.
En outre, une importante législation communautaire a des incidences
dans le domaine culturel, notamment en matière de marché intérieur, de
concurrence ou de commerce international.
Enfin, les décisions de la Cour de justice européenne constituent une jurisprudence incontournable en matière culturelle.
José Monplet / Ubiqus Content pour Localtis, mars 2002